2007 - DRACULA
Du 17 juillet au 12 août 2007
20 représentations
18.000 spectateurs
D'après le roman de Bram Stoker
L'Abbaye sous le joug d'un grand saigneur
(...) Avec sa majesté, ses grandes pierres froides et ses courants d'air, l'abbaye évoque sans mal le château de Dracula, sinistre nid d'aigle perché au sommet des Carpates. (...) Parfois, l'hémoglobine qui perle au coin de la bouche de Lucy, la première victime, ou les cheveux dressés sur la tête des trois femmes vampires, plus punk que démoniaques, penchent plutôt vers le grotesque que l'épouvante, mais l'ensemble réussit un bon dosage entre théâtre romanesque et diverstissement sons et lumières. (...) Dans la peau du suceur de sang, Claudio Dos Santos affiche une distance pleine de sang-froid dans le jeu, mêlée plus tard aux cascades et aux attaques d'un caractère au sang chaud. Face à lui, Nicolas Buysse transpire subtilement l'angoisse du clerc de notaire Harker, qui découvre peu à peu la véritable nature de son hôte. Le public suit le jeune homme sur les traces du vampire à travers l'abbaye, à la rencontre du professeur Van Helsing (le toujours formidable Pascal Racan), de Lucy (Anouchka Vingtier, candide à souhait) ou encore de Renfield (le survolté et excellent Yves Degen), fou à lier détenteur de secrets. L'œuvre de Bram Stoker est ici largement raccourcie mais recèle tous les ingrédients vampiriques pour en faire frémir ou rire, petits et grands. Pas de quoi en faire des cauchemars la nuit mais on avouera tout de même qu'à minuit, à l'heure où le spectacle finit et où la lune réveille les morts, on ne se serait pour rien au monde attardée dans les ruines de l'abbaye.
Catherine Makereel, Le Soir, 20 juillet 2007
AFFICHE & PHOTOGRAPHIES
Pour quelques gouttes de sang...
Collier d'ail au cou, on jurerait que la démesure ténébreuse des ruines de Villers a du sang de Dracula dans ses ogives dévorées par la végétation: un écrin parfait pour le héros des Carpates! La scénographie qu'y intègre Patrick de Longrée (terrasses, salon, cimetière, cage d'aliéné) ne le dépare pas, tandis que les lumières de Christian Stenuit sortent le grand jeu des bleus nuit, des faisceaux embrumés, des flambeaux qu'un zeste de magie attise. Ajoutez-y une très présente musique qui s'alanguit entre Mahler et Hollywood, avec bruitage de grincement de portes, d'orages, des costumes historiques soignés et une mise en scène qui tient le rythme et soigne les apparitions du comte assoiffé d'immortalité. Del Diffusion, aux commandes des spectacles d'été à Villers depuis 21 ans, a donc misé sur l'épique populaire d'un mythe que l'on connaît peut-être davantage par le cinéma que par le livre de l'Anglais Bram Stoker (1897). (...)
Michèle Friche, Le Vif/ L'Express, 27 juillet 2007
Dracula en plein air
Si l'adaptation et la mise en scène fonctionnent si bien, c'est aussi grâce à la très belle scénographie de Patrick de Longrée qui utilise parfaitement le lieu, ses recoins, ses ombres et ses lumières, et au jeu impeccable de Pascal Racan en Van Helsing, celui qui tentera d'arrêter le prince des vampires.
M. S., Télémoustique, 25 juillet 2007
LA DISTRIBUTION
CLAUDIO DOS SANTOS (Dracula)
PASCAL RACAN (Abraham Van Helsing)
NICOLAS BUYSSE (Jonathan Harker)
TANIA GARBARSKI (Mina Harker)
ANOUCHKA VINGTIER (Lucie Westenra)
YVES DEGEN (Renfield)
RONALD BEURMS (Dr John Seward)
DENIS CARPENTIER (Quincey P. Morris)
FREDERIK HAUGNESS (Arthur Holmwood)
AMANDINE HINNEKENS (Femme vampire)
MAÏTÉ LEBLICQ (Femme vampire)
LAURE TOURNEUR (Femme vampire)
L'EQUIPE DE REALISATION
Adaptation: DENIS LEDDET et CHRISTIAN LUTZ
Réalisation des costumes: CORINNE de LAVELEYE
Scénographie: PATRICK de LONGRÉE
Création des lumières: CHRISTIAN STENUIT
Création des maquillages: JEAN-PIERRE FINOTTO
Décor sonore: LAURENT BEUMIER
Assistant à la mise en scène: PIERRE RONTI
Régie de plateau: NOËL BAYE
Régie tops: PIERRE RONTI
Régie son: NICOLAS PERRETIER
Réalisation des costumes: SOPHIE DE CUYPER, JOACHIM LAMEGO DE ALMEIDA, AURÉLIE LALANDE
Habilleuse: MARIANNE BRACONNIER
Accessoires: NOËL BAYE
Construction des décors: JEAN-JACQUES ALLART, JOËL BOUQUIAUX, OLIVIER DE BONDT, KARL DESCARREAUX, JEAN-POL FOLLAND, STEVE GILLAIN, DAVID LAGNEAU, OLIVIER WATERKEYN
Peintures: OLIVIER WATERKEYN, DANIÈLE CAMPÉ
Prothésiste: FABRICE CECILIANO
Opérateurs lumières: CHRISTIAN STENUIT, LUC DE CLIMMER
Equipement son et lumières: BLUE-SQUARES
Responsable équipe d’accueil: JESSICA PENNEMAN
Accueil réservations: PAULINE CLAES, ISABELLE DAELEWYN, ALICE DERU, ANNE-LAURENCE LEFIN, SEVERINE WEYNE
Assistant de production: DAVID SAMUËL COURTOIS
Produit par: PATRICK de LONGRÉE et RINUS VANELSLANDER
Une production de DEL DIFFUSION VILLERS avec l'aide du Ministère de la Culture de la Communauté française, du Commissariat général au Tourisme de la Région wallonne; avec le soutien de AUDI LEASE, DUVEL, VALENS, FESTIWAL.BE, LA UNE, LA PREMIERE, LE VIF/ L'EXPRESS, LE SOIR; avec l'appui de FOURCROY, IMPRESSION BELGIUM, RENT A CAR, PLANTIN.
LES VAMPIRES AVANT DRACULA
Bien que la parution du roman Dracula de Bram Stoker en 1897 marque un véritable tournant dans l’histoire du vampirisme en littérature et qu’il constitue le fondement d’un véritable mythe des temps modernes qui s’est perpétué jusqu’à nos jours, Dracula ne fut pas le premier héros vampire.
Le célèbre roman de Bram Stoker emboîte le pas aux romantiques allemands du siècle précédent. Il y eut Gœthe avec La Fiancée de Corinthe en 1797 et des poètes anglais comme Byron (Le Giaour), Coleridge (Christabel), Keats (Lamia) qui furent envoûtés par ce thème hérité de l’Antiquité. Mais c’est en 1819 que le personnage fit sa première apparition dans la littérature en prose avec Le Vampire de John William Polidori, secrétaire et médecin de Byron. Le succès de ce texte précurseur fut immédiat en Europe, en partie en raison de son attribution au célèbre Lord. Dans une préface, l’auteur de Frankenstein, Mary Shelley, explique que Byron avait mis ses amis au défi d’écrire une histoire de mort-vivant lors d’une après-midi pluvieuse passée à la villa Diodati à Genève. Seule Mary Shelley réussit avec brio tandis que Byron esquissait l’ébauche d’un roman vampirique. Une querelle sépara Byron de Polidori et, l’année suivante, ce dernier poursuivit seul l’histoire de son mentor en la modifiant. S’éloignant des caractéristiques légendaires qui faisaient du vampire un être repoussant, le jeune homme choisit d’établir le portrait d’un aristocrate séducteur dangereusement pervers –au profil Byronien. Son récit inspira aussitôt au français Cyprien Bérard une suite, Lord Ruthwen, ou les vampires (1820), publiée (et peut-être écrite) par Charles Nodier qui reste incontestablement l’ambassadeur du héros de Polidori. Il a su reconnaître l’être qui "épouvantera, de son horrible amour, les songes de toutes les femmes" (Le Journal des débats, 1819). L’adaptation théâtrale de Nodier (Le Vampire) fut reprise sur les scènes anglaises, sans pour autant permettre à Polidori de sortir de l’anonymat. Cependant, le vampire fascinait désormais et fut l’objet de mélodrames, vaudevilles et opéras-comiques. De nombreux auteurs français tels que Victor Hugo, Alexandre Dumas, Charles Baudelaire, Lautréamont, Prosper Mérimée, Maupassant et Paul Féval furent attirés par l’écriture fantastique, voire vampirique. Dans cette époque exaltée, ils ne purent résister aux attraits et à l’intensité du thème. En 1836, Théophile Gautier publie La Morte amoureuse. L’emprise de la femme vampire s’étendit alors à tout le XIXe siècle: à la suite de la belle Clarimonde de Gautier vint la troublante Carmilla de Joseph Sheridan (1872) et la jeune Cristina de Francis Marion Crawford (Car la Vie est dans le Sang, 1880), avant l’apparition des compagnes de Dracula. Bram Stoker ne restera pas insensible à ces visions romantiques où les termes de séduction, d’altérité, de sensualité, de transgression, de prédation, d’onirisme et de complicité s’entremêlaient subtilement. Ce fut dans cette fin de siècle marquée par les crimes de Jack l’Eventreur et de l’émergence de sociétés secrètes à caractère ésotérique et magique, que Bram Stoker s’apprêtait à livrer Dracula.
QUI EST BRAM STOKER?
Né près de Dublin, à Clontarf, Abraham Stoker voit le jour dans une modeste famille de sept enfants. Sa jeunesse est baignée de légendes irlandaises et de romans gothiques que lui conte sa mère. A seize ans, il entre au Trinity College et devient à vingt ans chroniqueur dramatique au Dublin Mail. En 1875, Bram Stoker écrit The Primerose path, un feuilleton publié dans la revue Shamrock et, en 1879, paraît Au-delà du crépuscule, un livre de contes pour enfants dédiés à son fils Noël. A partir de 1887, il publie des nouvelles devenues des classiques du genre fantastique comme La Maison du Juge ou La Squaw.
Gérant du Lyceum Theatre que dirige l’acteur Henri Irving à qui il voue une grande admiration, il considère l’écriture comme un passe-temps et ce n’est qu’après la faillite du théâtre en 1903 qu’il deviendra romancier à part entière, pour gagner sa vie. Passionné d’histoires fantastiques depuis sa plus tendre enfance, Bram Stoker a lu les grands classiques du vampirisme que sont Le Vampire de Polidori, Varney le Vampire, Carmilla ainsi que Le Mystérieux étranger, nouvelle traduite de l’allemand et publiée anonymement en 1860. Voulant à son tour écrire une histoire de vampires, il s’est documenté sur le vampirisme et les légendes de Transylvanie en lisant notamment The Land beyond the Forest (1888) d’Emily Gerard. Membre de l’ordre ésotérique de la Golden Dawn (l’aube dorée), il s’initie à l’occultisme et à la magie noire. Il passa des journées entières à la bibliothèque du British Museum pour authentifier son décor transylvanien. Il approfondit ses recherches ethnologiques, folkloriques, historiques et géographiques. Grand perfectionniste, Bram Stoker désirait aller plus loin que ses prédécesseurs en revisitant les traditions anciennes. Aussi, afin de saisir l’essence du personnage, il compulsa des traités de théologie, de médecine et de démonologie.
UNE IDEE ISSUE D'UN CAUCHEMAR
On peut se demander comment l’idée d’écrire ce roman est venue à Bram Stoker? A l’époque, en 1890, après avoir travaillé comme fonctionnaire à l’administration centrale de l’Irlande du Nord, il s’installa à Londres comme gérant du Lyceum Theatre. Stoker affirme dans ses notes que l’idée d’écrire un roman sur les vampires lui est venue lors d’un cauchemar d’une nuit de mars 1890 au cours duquel il eut la vision d’un jeune homme poursuivi par des filles dont l’une d’elles essaie de l’embrasser, pas sur les lèvres mais sur la gorge. Surgit alors un vieux comte, fulminant de rage et de fureur diabolique, qui décréta que le jeune homme lui appartenait. A partir de ce moment, Bram Stoker décida d’écrire, dans le plus grand secret, un roman sur un vampire qui portait au début le nom de “Comte Wampyr”.
La rencontre déterminante pour la genèse du roman est celle d’Arminius Vambery, professeur de langues orientales à l’université de Budapest, qui connaît parfaitement l’histoire et le folklore d’Europe centrale. C’est lors de son passage à Londres que Vambery raconte à Stoker l’histoire du véritable Dracula, Vlad Tepes, surnommé Drakul, et l’écrivain, séduit par la sonorité exotique du nom, décide de le donner au héros de son roman. Dracula paraît donc en 1897. Par la suite, il publiera d’autres romans d’aventures fantastiques tels que Le Joyau des Sept étoiles et un récit inspiré des légendes celtiques, Le Repaire du Ver blanc. Précurseur de la littérature de terreur moderne, il meurt en avril 1912. En 1914, la veuve de Stoker fera publier le premier chapitre de Dracula, que l’auteur avait décidé de supprimer, sous la forme d’une nouvelle intitulée L’Invité de Dracula.
L'ORIGINE DE DRACULA
Le nom du personnage de fiction se confond avec celui du personnage historique. Où finit l’histoire, où commence le roman? Ce personnage a bel et bien existé. Son nom: Vlad III, dit aussi l’Empaleur (1429-1476), Prince de Valachie (la Roumanie). Dracula est dérivé du substantif dragon qui, en roumain, se dit drakul, et le a signifiant “fils de”. Le père de Vlad Tepes a été surnommé Vlad II Drakul - Vlad II le Dragon - car il était membre de l'Ordre du Dragon. Par ailleurs,Drakul ne signifie pas que “dragon” en roumain, mais également “diable”. C'est cette ambiguïté syntaxique qui a été développée dans le roman de Stoker, soucieux de souligner l'aspect démoniaque du personnage.
UN ROMAN ORIGINAL
La structure du roman est particulière: le récit est épistolaire et est composé de fragments des journaux intimes et lettres des protagonistes, ainsi que d'articles de journaux. C'est donc un récit écrit à la première personne mais qui épouse plusieurs points de vue, ce qui souligne l'ambiguïté du personnage du Comte. Dans ces témoignages, le vampire est, la plupart du temps, présenté comme un monstre sans cœur, une représentation du mal absolu. Mais ce n’est pas toujours le cas. Il est ainsi remarquable que Mina Harker éprouve de la pitié à son égard. Quant à Abraham Van Helsing, il est véritablement fasciné, tant par le personnage historique que Dracula a été que par le vampire lui-même; il s’émerveillera, ainsi, de l’ingéniosité dont le prince des ténèbres a fait preuve pour préparer son voyage jusqu’à Londres: “Si un autre parmi les non-morts avait tenté cette même entreprise, tous les siècles qui furent et ceux qui seront n’y auraient peut-être pas suffi (…). Il a tout accompli tout seul, à partir d’une tombe en ruine au fond d’un pays oublié”.
UNE INTRIGUE CAPTIVANTE
Tout commence au château du Comte Dracula, près du col de Borgo, au cœur des Carpates en Transylvanie. Le Comte accueille Jonathan Harker, un clerc de notaire à qui il a confié la mission de régler les formalités d’achat de diverses propriétés en Angleterre. Le jeune homme, retenu prisonnier, comprend vite la véritable nature de son hôte. A son arrivée en Angleterre, Dracula jette son dévolu sur deux jeunes femmes. La première, Lucie, sera la victime idéale de sa soif de sang frais. La seconde, Mina (la fiancée de Jonathan Harker), tentera de résister aux assauts du vampire. Une course-poursuite s’engage. Jonathan, associé au Professeur Van Helsing (un éminent spécialiste des vampires) et au Docteur Seward (dont l’asile se trouve à proximité des lieux), tenteront de sauver les jeunes femmes et de venir à bout du vampire.
L'ADAPTATION POUR VILLERS-LA-VILLE
À l’instar des grandes adaptations qui ont été réalisées, notamment pour le cinéma par Murnau ou Coppola en passant par Herzog, celle qui a été réalisée spécialement pour cette production dans le site des ruines de l’Abbaye de Villers-la-Ville par Denis Leddet et Christian Lutz a mis l’accent sur les rapports humains qui égrènent le roman fleuve de Bram Stoker — ce qui pourrait apparaître comme gageure pour une fiction qui traite de morts-vivants !
Il s’agit pourtant des rapports d’amitié entre les jeunes Mina et Lucie, des rapports paternels entre le vieux sage Van Helsing et Mina, des rapports sociaux entre le marginal Renfield et les amis de Mina déterminés à vaincre le mal, bref d’un tableau-miroir de notre société qui revêt ici une force étrange.
Nous découvrons aussi un Dracula séculaire qui, face à une Mina séduite par la perspective de l’éternité (on songe bien sûr au mythe de Faust), doutera de son projet maléfique. Ainsi, la relation triangulaire entre Mina, Jonathan (son fiancé) et le comte Dracula, tente de mettre en perspective les contraintes du temps qui s’écoule inexorablement face à la puissance de l’amour…
Les émotions et les sentiments qui nous préoccupent tous se voient ainsi traduits dans un conte destiné au plus large public, afin de susciter à la fois la réflexion et le plaisir d’une histoire et d’un mythe universels.